Page:Féval - Cœur d’acier,1865.djvu/357

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laume comme de moi-même, mais il faut que ces choses soient faites et bien faites. Les événements sont dans les mains de la Providence. Duc, nous irons tous à Grenoble, quand le temps sera propice, et nous témoignerons.

Mais le temps, désormais, ne devait jamais être propice.

Vers la fin de ce même mois de mai, les deux frères échangèrent l’adieu. Guillaume de Clare était guéri ; le sort semblait pencher de nouveau vers les Bourbons, et Guillaume ne voulait point rester oisif à l’heure de la lutte. Il partit. Lady Stuart le suivit.

Quand le duc et sa jeune femme se trouvèrent seuls de nouveau dans le grand salon du château, Thérèse pleura.

— Tu les regrettes ? demanda Raymond.

— Ils s’en vont pour nous combattre, répondit Thérèse.

— C’est le malheur des guerres civiles, murmura le duc. Mais je t’en prie, Thérèse, dis-moi que tu les aimes.

— J’aime lady Stuart, prononça tout bas la jeune duchesse. Elle m’aime.

— Mon frère Guillaume ne t’aime-t-il pas aussi ?

— Je ne sais… fit-elle après un long silence.

Puis elle ajouta en se couvrant le visage de ses mains :

— Si notre petit Roland n’était plus en vie, Monsieur Guillaume (elle souligna le mot Monsieur) serait héritier de tous les biens et de tous les titres de la maison de Clare !

Le canon de Waterloo tonna, puis se tut. L’Empereur était le prisonnier de l’Angleterre.

Au dernier moment de la lutte, le duc Raymond, blessé qu’il était et si faible qu’il avait peine à monter à cheval, avait endossé le harnais pour se mettre à la tête d’un corps de volontaires. Il fut pris les armes à la main et conduit à Grenoble où siégeait la commission militaire.

Thérèse était dans la ville avec son fils, mais elle n’obtint jamais la permission de passer le seuil de la prison.

Les tribunaux exceptionnels sont par-