Page:Féval - Cœur d’acier,1865.djvu/358

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tout et toujours les mêmes. Le duc Raymond, comme tant d’autres, avait fait sa soumission au roi Louis XVIII avant les Cent-Jours. Il fut appelé devant la cour prévôtale, sous l’accusation de haute trahison.

La veille du jour où il devait être jugé, le même paysan qui avait frappé jadis une nuit à la porte du château de la Nau-Fabas fut introduit dans sa prison. Les ordres étaient pourtant bien sévères, mais il n’est point de clef que l’or ne puisse faire tourner.

Les deux frères restèrent une demi-heure ensemble. Guillaume de Clare emporta le portefeuille de Raymond, lequel contenait tous ses papiers de famille.

Ceci faisait partie d’un plan qui devait, sinon sauver l’accusé, du moins retarder le jugement.

— Nous aurons ainsi quelques jours de répit, avait dit le général royaliste. En quelques jours on fait bien des choses ! »

Le duc Raymond répondit :

— Frère, j’irai jusqu’à fuir, s’il le faut, à cause de ma Thérèse bien-aimée et de mon enfant. Agis pour le mieux, je mets mon salut entre tes mains.

Guillaume, qui était sur le point de sortir, revint pour ajouter :

— Quand même tu trouverais un moyen de communiquer avec la duchesse, pas un mot de notre projet ! Sa frayeur et son indignation seront notre meilleur auxiliaire devant le tribunal. Si l’on pouvait supposer que toi et moi nous sommes d’accord, tout serait perdu.

Ceci était très vrai, mais très subtil. Les choses trop subtiles sont dangereuses.

Le lendemain, le général Raymond de Clare comparut devant ses juges. Dans un coin de la salle, il y avait une pauvre femme voilée qui portait un enfant dans ses bras.

L’audience durait depuis une heure à peine, lorsqu’un huissier remit une lettre au président. Il y eut aussitôt un mouvement parmi les juges, et un nom courut de bouche en bouche dans l’auditoire :

Le général de Clare !

Selon la mode anglaise, Guillaume,