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Page:Féval - Cœur d’acier,1865.djvu/491

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un étrange mouvement de joie.

— Elle le prononcera ! dit-elle d’un accent si résolu que le cœur de Léon tressaillit dans sa poitrine. Avant la fin de cette fête, vous entendrez l’aveu tomber de sa propre bouche. Je m’y engage. Êtes-vous content ?

— Si Dieu veut cela, Madame, répondit le jeune notaire d’une voix étouffée, je vous appartiendrai : mon cœur et mon honneur !

Autour de ces étranges paroles, les quadrilles mêlaient leurs cérémonieuses figures. Et tout ce qui se peut dire de grave et de frivole se disait avec accompagnement des motifs du Domino noir qui était alors tout jeune, et du Pré-aux-Clercs, qui sera jeune toujours. On parlait du roman à la mode et du changement de ministère, de la partition promise par Meyerbeer, du drame de Victor Hugo et de la censure qui se torturaient l’un l’autre, d’une duchesse qui avait trompé une danseuse, d’une danseuse qui allait s’éveiller duchesse ; Dieu me pardonne ! On parlait de la dot de la reine des Belges, un pauvre étroit million, le dixième de la dot d’une baronne d’Israël, et l’on trouvait cela trop cher pour une fille et pour une femme de roi.

Et par dessus tous ces bourdonnements, comme le dessin net d’une broderie court parmi des milliers de fils entrelacés, l’histoire de Clare allait, brodée aussi, aussi entrelacée.

Il y avait plus d’un quart d’heure que le grand avocat, M. Mercier, causait avec le prince Policeni.

Veuillez penser qu’il s’agissait d’une restauration, sujet particulièrement cher à M. Mercier et à presque tous ceux qui étaient rassemblés ici.

Plus d’une mère parmi celles qui étaient douées de filles à placer noblement, suivaient déjà d’un œil diplomatique ce garde du corps du roi de Naples, chrysalide inconnue qui allait naître papillon. M. Cœur, le maître de l’atelier Cœur-d’Acier, faisait rire. Un de Clare peindre des enseignes ! Il avait tout le monde contre lui, excepté Mme la marquise douairière de La Rochegaroux, l’amie des Louis XVII passés,