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Page:Féval - Cœur d’acier,1865.djvu/531

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quels yeux le guettaient à travers les trous du masque, et quel cœur battait sous ces flots de gaze nuageuse qui, pour lui, composaient le costume de la princesse d’Eppstein, il n’aurait pas été frappé plus violemment.

Peut-être même n’eût-il pas tremblé davantage, car il était brave non seulement par caractère, mais encore par tempérament.

Il y a une chose qu’il faut dire pourtant, c’est que si Léon de Malevoy avait reconnu tout d’un coup Marguerite sous l’effronté mensonge de son rôle, sa première pensée aurait été celle-ci :

Je vais être poignardé cette nuit.

En effet Marguerite, même dans le feu de cette martingale qu’elle doublait avec une si fiévreuse témérité, ne pouvait laisser tomber un pareil secret que dans une oreille condamnée.

Car la moitié de ce secret, à tout le moins, était l’effrayante et pure vérité.

Mais Léon ne devinait point, et Marguerite n’avait pas même l’idée qu’il pût deviner.

Comme toutes les grandes actrices, elle s’identifiait avec son rôle.

— Me croyez-vous, Monsieur de Malevoy ? demanda-t-elle après un silence.

— Oui, répondit Léon, je vous crois : le comte est perdu, vous aussi !