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Page:Féval - Cœur d’acier,1865.djvu/84

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cuir, il poussa un petit cri de surprise. Beaucoup de mains savantes reconnaissent la soyeuse étoffe du billet de banque à travers le maroquin.

— Domino ! s’écria le roi, oubliant toute prudence, il y a du sucre !

Un mouvement involontaire de Marguerite fit tourner tous les yeux vers la porte qui montrait sa claire-voie noire comme une mystérieuse menace.

M. Beaufils murmura :

— Mauvais endroit pour faire l’autopsie du calepin !

Et approchant sa bouche de l’oreille de Comayrol, il ajouta :

— J’ai vu une tête… là ; hé, bonhomme !

Ce Comayrol était un garçon de moyens, comme nous en aurons d’abondantes preuves par la suite. Il marcha sur le pied de M. Beaufils, qui n’appartenait point à l’étude Deban et reprit, comme si celui-ci lui eût dit tout autre chose :

— Truand, mon ami, je comprends votre légitime impatience. Procédons à l’inventaire. Je romps les scellés.

— Attention ! dit Beaufils tout haut. Pas de tricherie !

— Les scellés sont rompus ! No 1, une contremarque du théâtre du Panthéon… pour la représentation des Bohémiens de la périlleuse montagne… je vous avais dit : Domino !

Il fit le geste de fouiller plus avant. La bande joyeuse qui flairait le stratagème éclata de rire.

No 2, poursuivit Comayrol, une reconnaissance du Mont-de-Piété, un gilet : cinq francs ; il devait être élégant.

No 3 et dernier : une feuille de copie de lettres, pliée en huit, pour faire des cigarettes économiques, contact soyeux, propre consistance du billet de banque, origine de ma déplorable erreur et de mon cri : Domino !

D’une seule voix, en chœur, la bande joyeuse donna ces deux notes profondes et convaincues :

— Volés !

M. Beaufils ajouta :

— Pas de chance !

La scène était parfaitement bien jouée, ni trop longue, ni trop courte, sans détails inutiles, sans charge, sans affectation. Elle eût réussi près de Marguerite elle-