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Page:Féval - La Quittance de minuit, 1846 - tome 1.djvu/51

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LES MOLLY-MAGUIRES.

parmi ces dangers sans cesse renaissants. Son merveilleux instinct lui faisait deviner l’étroite langue de terre solide qui courait en zigzag entre les fangeux précipices.

Il tournait les larges flaques d’eau ; il doublait ces gazons perfides qui recouvrent des lacs de boue ; il s’enfonçait intrépidement au milieu des forêts de joncs et de pins de marais. Et il allait, il allait toujours, sans jamais ralentir sa marche…

La lune était sous un énorme nuage noir, et la vaste étendue des bogs se perdait dans une obscurité presque complète.

Morris flattait de la main son poney ; il lui parlait pour soutenir son ardeur. Tout en parlant, il avait la tête penchée dans l’attitude de la méditation.

Il était en ce moment à quatre ou cinq milles déjà de la lisière des terrains cultivés qui avoisinent Carndulla.

À un mille en avant de lui coulait la petite rivière de Moyne.

— Hardi, ma bouchal ! murmurait-il, employant le patois familier des campagnes. Ferme ! mon bijou ! Arrah ! arrah !

Tout à coup il se tut, et sa tête se redressa vivement.