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Page:Féval - La Quittance de minuit, 1846 - tome 2.djvu/103

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LES SAXONS.

de la voiture fermée se chargeait d’une insupportable odeur de rhum et de gin…

« Le jour vint ; je le reconnus à une faible lueur qui passa entre le masque et ma lèvre.

« Il n’y avait au masque aucune autre ouverture.

« Je ne connaissais point la campagne de l’Angleterre ; l’eussé-je connue, je ne saurais point dire encore quelle route nous suivîmes, car je ne voyais rien, et bien peu de sons arrivaient jusqu’à mon oreille.

« Je crois que nous tournions autour de Londres, et je vous dirai plus tard, Morris, le motif de cette croyance que mes réflexions ont affermie.

« Cette longue route était un simulacre de voyage : on voulait me dépayser et m’ôter tout moyen de connaître le lieu de ma retraite, afin que je fusse bien morte et que, au cas même où l’appel de ma détresse parviendrait au dehors, cet appel, entendu, ne pût me profiter !…

« Que faire pour un être qui crie au secours, et qui ne sait point dire où le secours doit être porté ?

« Que faire ? Des yeux pourront lire ma plainte signée du reste de mon sang ; mais ils