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DEUXIÈME PARTIE

oreilles de l’heiress et lui faisaient saigner le cœur.

Pat et Gib avaient besoin de se montrer. Ils étaient enchantés d’ailleurs de voir les passions de la foule s’agiter dans cette voie nouvelle. Grâce à cette diversion opportune, on oubliait à la fois le poste douteux occupé par l’ancien garçon de ferme de Luke Neale, et cet homme chevelu dont Mahony-le-Brûleur n’avait pu reconnaître le visage à travers les carreaux de l’hôtel du Roi Malcolm.

On oubliait le gardien du monstre nourri pour la ruine des catholiques, et le traître qui s’asseyait à la table des orangistes.

Aussi s’en donnaient-ils à cœur-joie tous les deux ; ils hurlaient à l’unisson des deux côtés de la pauvre Ellen, qui luttait contre son désespoir et rappelait sa force défaillante.

C’était une lutte amère, car Ellen était seule au milieu de cette cohue hostile dont la voix menaçante montait et tonnait autour d’elle. Parmi tous ces bras robustes, pas un bras qui pût l’appuyer ; parmi tous ces cœurs ardents, pas un cœur qui ne se soulevât contre celui qu’elle aimait ; partout des ennemis, et des ennemis poussés à bout, des âmes ulcérées, des haines furieuses.