Aller au contenu

Page:Féval - La Quittance de minuit, 1846 - tome 2.djvu/83

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
75
LES SAXONS.

des blasphèmes, des gageures insensées et de folles provocations.

« George Montrath, qui s’asseyait à côté de moi, m’ordonnait de rire, et de boire, et de chanter. Ma résistance le mettait en fureur ; on eût dit qu’il avait honte de voir la victime échue en partage à Sa Seigneurie moins docile que les autres et moins prompte à tomber.

« Plus d’une fois, pendant que sa bouche vociférait un blasphème, sa main tremblante se leva sur moi pour me frapper.

« Mais je n’avais pas peur en mon désespoir morne, et mon regard calme ne se baissait pas sous le sien.

« Hélas ! Morris, pourquoi vous êtes-vous défié de moi ! Pourquoi n’êtes-vous pas venu me demander le fond de ma conscience ! Vous avez vu Londres ; vous avez erré durant de longs jours autour de la demeure de Montrath qui était la mienne ; et vous n’êtes pas venu jusqu’à moi ! Vous vous êtes tant hâté de croire à mon malheur que vous l’avez fait irréparable !

« Morris, si vous étiez venu, je vous aurais dit : « Dieu m’a sauvée ! » Je vous aurais dit : « Je suis pure de corps et d’âme, » et vous m’auriez crue, mon fiancé, car vous m’aimiez et vous sa-