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LE CHATEAU DE MONTRATH.

On l’aurait prise fort au dépourvu si on lui eût demandé pourquoi elle poursuivait lord George Montrath. Ce dernier, en effet, ne lui refusait rien ; il était à genoux devant ses moindres caprices, et la plus adorée de toutes les maîtresses n’avait jamais exercé une tyrannie si complète que la sienne.

Son obsession était donc toute gratuite ; elle persécutait le pauvre lord sans trop savoir pourquoi, et par suite d’une habitude prise.

Peut-être était-ce une vengeance instinctive exercée sur cet homme qui avait été son maître ; peut-être était-ce un calcul machinal qui consistait à faire incessamment acte de puissance, pour tenir Montrath en bride et rendre toute révolte impossible.

Et si tel était le but de Mary Wood, sa peine restait en vérité fort inutile, car le pauvre lord ne songeait point à regimber. Il payait, il payait sans cesse, demandant grâce parfois, mais ne luttant jamais.

Il semblait avoir accepté son sort avec une résignation chagrine. Il sentait sa chaîne, il s’avouait esclave, il obéissait.

Mary Wood le tenait pris entre les cornes d’un très-redoutable dilemme.

Si Jessy O’Brien venait à mourir, lord George