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LE BOSSU.

— Je ne suis qu’un pauvre gentilhomme… Suis-je un gentilhomme ?… Je n’ai pas de nom… mon nom me vient des murailles ruinées où j’abritais mes nuits d’enfant abandonné… hier, j’étais un proscrit… et pourtant vous avez dit vrai, madame, j’ai fait ce rêve… non point un rêve insensé… J’ai fait un rêve radieux et divin… ce que je vous avoue aujourd’hui, madame, était, hier encore, un mystère pour moi… Je m’ignorais moi-même…

La princesse sourit avec ironie.

— Je vous le jure, madame, continua Lagardère, — sur mon honneur et sur mon amour !

Il prononça ce dernier mot avec force.

La princesse lui jeta un regard de haine.

— Hier encore, poursuivit-il, — Dieu m’est témoin que je n’avais qu’une seule pensée : Rendre à la veuve de Nevers le dépôt sacré qui m’était confié… Je dis la vérité, madame, et peu m’importe d’être cru, car je suis le maître de la situation et le souverain juge de la destinée de votre fille… Dans ces jours de fatigue et de lutte, avais-je eu le loisir d’interroger mon âme ?… J’étais heureux de mes seuls efforts, et mon dévouement avait son prix en lui-même ?… Quand je suis parti de Madrid pour venir vers vous, je n’ai ressenti aucune tristesse… Il me