Page:Féval - Le Bossu (1857) vol 4-6.djvu/430

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
208
LE BOSSU.

Il ne faut pas commencer par lui lier les deux jambes… la première condition du succès dans un assaut galant, c’est la solitude… Où vîtes-vous une femme se rendre quand elle se voit entourée de regards curieux ? Soyez juste : c’est là l’impossible !

— Il a raison ! fit encore le chœur des convives.

— Tout ce monde l’effraye, reprit Ésope II ; moi-même, je perds une partie de mes moyens, car, en amour, le tendre, le passionné, l’entraînant est toujours tout près du ridicule… Comment trouver de ces accents qui enivrent les faibles femmes en présence d’un auditoire moqueur ?

Il était vraiment drôle, ce petit homme, prononçant son discours d’un air avantageux et fat, le poing sur la hanche et la main au jabot.

Sans le sinistre vent qui soufflait cette nuit dans la petite maison de Gonzague, on aurait bien ri !

On rit un peu. Navailles dit à Gonzague :

— Accordez-lui sa requête, monseigneur.

— Que demande-t-il ? fit Gonzague toujours distrait et soucieux.

— Qu’on nous laisse seuls, ma fiancée et moi, répondit le bossu ; j’ai quelques petits talents… je ne vous demande que cinq minutes