Page:Féval - Le Fils du diable - Tomes 1-2.djvu/265

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front ; Roger de Beauvoir, le chroniqueur élégant ; Hippolyte Castille, le charmant conteur ; voilà Grimm le ressuscité, Grimm qui nous a ramené la critique brillante, spirituelle, excentrique, Grimm qui est romancier aussi, et des meilleurs, sous son vrai nom d’Amédée Achard.

Voici enfin, comme partout, Mirelune et Ficelle, tous deux le lorgnon dans l’œil, faisant foule, l’un gai, l’autre triste, et donnant gratis le spectacle de leur généreuse amitié.

Le gentilhomme applaudit dans la main du vaudevilliste qui lui bâille cordialement au nez en élaborant un couplet ravissant…

Au moment où Franz faisait son entrée, la salle était au grand complet, parce que Eugène Grisier, le neveu du professeur, venait de faire assaut avec un maître d’armes de régiment qu’il avait coupé en six parties égales, aux applaudissements de la galerie.

Franz demanda Grisier à ses voisins. On lui montra un homme en habit bleu qui surveillait du coin de l’œil les assauts de ses élèves, tout en faisant lui-même assaut de calembours avec le comte de Mirelune.

Franz se coula entre les joueurs et le vestiaire, afin d’aborder le professeur.

Il lui dit quelques mots à voix basse. Grisier l’examina de la tête aux pieds.

— Monsieur, répliqua-t-il, je suis à vos ordres.

Il mit bas son habit bleu, boucla son-plastron et se coiffa de son masque.

Mirelune désigna du doigt le nouvel arrivant à son Pollux Ficelle. Celui-ci essaya de faire une pointe sur le jeune homme, mais il ne put pas.

Ce qui manque dans la salle Grisier, c’est la place. Il fallut attendre que deux combattants fissent trêve. Franz regardait tous ces gens manier l’épée avec aisance ; il regardait Eugène, ferme sur ses jarrets d’acier, l’œil au guet, la main rapide comme la foudre, et il ne pouvait se défendre d’une secrète envie.

Au bout de quelques minutes d’attente, Grisier le planta en garde solidement et lui mit un fleuret dans la main.

— Nous allons causer tout à l’heure, lui dit-il ; mais maintenant il y a trop de monde… Attention, s’il vous plaît !…