Page:Féval - Le Fils du diable - Tomes 1-2.djvu/482

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Le docteur avait les mêmes pensées ; seulement il les creusait davantage, et arrivait à une conclusion.

— Il faut serrer notre jeu, dit-il après quelques secondes de silence ; — et, tout d’abord, il faut se bien garder de mécontenter ce malheureux, qui pourrait nous susciter de grands embarras !

— J’allais émettre justement une opinion pareille, ajouta le baron de Rodach ; et, s’il m’était permis de parler comme étant de la maison, je dirais que nous devons ménager ce Verdier, et aller au-devant de ses exigences… On ne sait pas ce qui peut arriver !

— Je serais d’avis, opina le docteur, que M. de Reinhold se rendit au plus tôt chez ce Verdier, pour obtenir de lui des explications plus précises.

Il y avait du vieil enfant chez ce Reinhold.

— Que je retourne auprès de ce misérable coquin, moi ! dit-il en retrouvant toute sa puérile colère ; il peut bien mourir dix fois dans son taudis, sans que je me donne la peine d’en monter les cinq étages !… Il m’a trompé indignement, et je ne veux plus entendre parler de lui !

— Mais… commença le docteur.

— Tout ce que vous pourrez dire sera parfaitement inutile !… je ne veux pas !… Qui sait d’ailleurs si cette lettre n’est pas un piège, si je ne rencontrerai pas quelque guet-apens dans sa mansarde ?

— Ceci ne serait pas impossible, dit M. de Rodach ; mais j’ai eu dans ma vie des aventures bien plus effrayantes que celle-là… et si vous voulez m’en donner la mission, j’irai trouver moi-même ce Verdier de votre part.

Reinhold s’inclina de mauvaise grâce, tandis que don José Mira remerciait au contraire avec chaleur.

— Maintenant, reprit Rodach, je ne retiens plus monsieur le chevalier de Reinhold, à qui je demande pardon d’avoir retardé si longtemps son rendez-vous… Je ne voudrais pas néanmoins qu’il nous quittât sous l’impression pénible causée par la lecture de cette lettre… J’offrais, il y a quelques instants, mon aide à la maison de Geldberg ; je la lui offre encore, et, sans promettre positivement de réussir, je puis donner néanmoins de bonnes espérances.