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CHAPITRE VIII.

LA TENTATRICE.

Lia ne savait pas qu’il y avait des yeux ouverts sur sa rêverie solitaire. Son cœur était avec l’absent ; elle se recueillait en son amour et oubliait le reste du monde.

Madame de Laurens avait eu véritablement du malheur ! Si elle avait rompu le cachet de la lettre que nous venons de lire, au lieu de tomber sur deux missives insignifiantes, elle n’aurait pas eu grand’peine à deviner le nom de l’amant mystérieux.

Cette lettre était celle que Lia aimait le plus, on y trouvait bien de la tristesse encore, mais on y voyait tant d’amour !

Dans les autres, la passion, combattue, semblait craindre de se montrer. C’était un homme fort et novice à soupirer, qui frémissait sous le joug et qui s’indignait de sa faiblesse.

Dans celle-ci, au contraire, il s’appuyait sur son amour, et il s’applaudissait d’aimer. Il appelait la tendresse de Lia comme un talisman protecteur ; le remords, qui venait toujours arroser ses épanchements, se taisait cette fois. Il espérait, il parlait d’avenir, et Lia était bien heureuse, car cet espoir venait d’elle.

Quand son regard eut épelé la dernière ligne de la lettre, elle porta le papier à ses lèvres et mit sur l’écriture à demi-effacée un baiser recon-