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CHAPITRE XIII.

TROIS AMBASSADEURS.

Les choses de la vie ordinaire se présentent parfois sous des aspects quasi surnaturels. Il suffit de deux ou trois hasards, combinés de certaine sorte, pour donner aux hommes ou aux événements des apparences fantastiques.

M. le baron de Rodach, le cavalier allemand, prenait dans les souvenirs de Franz, et surtout dans ceux de la jolie Gertraud, qui ne savait rien que par Franz, des proportions tout à fait merveilleuses.

Franz repoussait cette impression de tout le scepticisme de son éducation parisienne ; Gertraud, au contraire, laissait travailler avec une terreur mêlée de charme son imagination allemande. Elle ajoutait à la bizarre histoire de Franz ; elle complétait la légende ; elle la teignait de ces nuances vagues qui forment comme un voile à travers lequel la poésie germanique nous montre ses nocturnes fantaisies. Elle passait du monde des vivants dans cet autre monde, rempli d’êtres surhumains que ne savent point arrêter les obstacles de la vie, qui peuvent tout, qui devinent tout, et dont l’histoire mystérieuse est écrite dans les vieilles ballades.

Franz n’allait pas si loin que cela : mais, à l’idée du cavalier allemand, il ne pouvait pas se défendre toujours d’une superstitieuse émotion. C’était de l’espoir et c’était de l’effroi.