Page:Féval - Le Loup blanc, 1883.djvu/278

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Une seule chose manquait au festin, c’était la présence d’Alix, retenue en son appartement par la fièvre qui ne l’avait pas quittée depuis la veille.

Mais Alix, il faut le dire, était merveilleusement remplacée par sa tante, mademoiselle Olive de Vaunoy, laquelle tenait le centre de la table, et faisait les honneurs avec une grâce qu’il ne nous est point donné de décrire.

Parmi les valets qui servaient à table, nous citerons maître Alain et Lapierre. Vaunoy ne les perdait pas de vue ; et, tout en faisant mille caresses au jeune capitaine, il paraissait accuser ses deux suppôts de lenteur, et contenait difficilement son impatience.

Le premier service avait été enlevé pour faire place aux rôtis, puis à la pâtisserie, qui, placée au centre de la table, s’entourait d’un double cordon de dessert. On versait les vins du Midi, ce qui semblait causer à Béchameil et à l’officier rennais une notable satisfaction.

Didier tendit son verre par-dessus son épaule. Ce fut Lapierre qui versa. Vaunoy et lui échangèrent un rapide coup d’œil.

Mais, au moment de porter le verre à ses lèvres, Didier se tourna brusquement et regarda Lapierre en face.

Le saltimbanque émérite soutint parfaitement ce regard, et demeura sans sourciller, à la position du laquais derrière la chaise de son maître.

Didier répandit ostensiblement le contenu de son verre sur le parquet, et fit à Lapierre un signe impérieux de s’éloigner, ce que celui-ci exécuta aussitôt en s’inclinant avec un feint respect.