Page:Féval - Le Loup blanc, 1883.djvu/87

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creux soutient vaillamment le pesant fardeau de ses branches colossales. Les deux moulins chancellent et menacent ruine comme autrefois, et c’est à peine si l’on aperçoit que la pauvre loge de Mathieu Blanc s’est affaissée au ras du sol, tant le détail est mince et peu digne d’attention.

Quant à l’étang de la Tremlays, ce sont toujours les mêmes eaux dormantes et la même moisson de roseaux sous lesquels blanchissent dans la vase les ossements de Loup, le fidèle chien de Nicolas Treml.

Nous sommes à l’automne de l’année 1740, et il y a veillée dans les cuisines de M.  Hervé de Vaunoy de la Tremlays, seigneur de Boüexis-en-Forêt.

La cuisine est une grande pièce carrée, percée de quatre fenêtres hautes. Une porte de chêne, garnie de fer, ouvre ses deux battants vis-à-vis de la vaste cheminée dont le manteau, en forme de toiture, peut abriter une compagnie raisonnablement nombreuse. Cinq ou six bûches brûlent dans l’âtre et mêlent leur rouge lumière à la lueur crépitante de deux résines.

Sur la table massive qui occupe le milieu de la pièce, une rangée de pichets (cruches), méthodiquement alignés, exhale une bonne odeur de cidre dur. Des pommes de terre rôtissent sous les cendres, et une demi-douzaine de quartiers de lard montrent, des deux côtés de la crémaillère, leur couenne recouverte de suie.

Nous faisons grâce au lecteur des fourneaux, casseroles, cuillers à pots, marmites, écumoires, etc.

Il y a une quinzaine de personnes assises sous le manteau de la cheminée. La plupart sont serviteurs ou ser-