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connaître le bon Renaud de Saint-Venant, très-pâle, un peu tremblant et tenant à la main un large pli, entouré de lacs de soie.

Son oreille était collée à la serrure. Il resta là une minute ou deux immobile et retenant son souffle comme s’il eût voulu se bien assurer qu’il n’y avait personne à l’intérieur.

Sa main toucha enfin le loquet de la porte.

Mais au lieu d’ouvrir, il frappa discrètement, disant :

« Guezevern, mon digne ami, êtes-vous encore là ? »

Comme nulle réponse ne rompit le silence, l’homme ajouta, en élevant la voix quelque peu :

« Êtes-vous là, Guezevern ? C’est moi, Saint-Venant, votre ami et compère. Ouvrez-moi, je vous prie, je tiens en main un message de Mme Éliane, votre femme bien-aimée. »





XVI

L’HÉRITAGE DE GUEZEVERN


Renaud de Saint-Venant attendit encore une seconde ; le nom d’Éliane ainsi prononcé, n’ayant amené aucun signe de vie à l’intérieur, Renaud se dit :

« C’est bien lui qu’on a dû rencontrer sur le chemin de la rivière ! »

Et il pesa sur le loquet. La porte, qui n’était pas fermée à clef, s’ouvrit aussitôt.

Renaud de Saint-Venant, malgré la presque certitude qu’il avait d’être seul dans cette chambre, dit en entrant, par précaution :

« Dormez-vous, Guezevern ? »

Sa voix chevrotait dans sa gorge. Il avait conscience de jouer ici un jeu à se faire fendre le crâne.