Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/117

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chait ni le luxe des hommes, ni la brillante coquetterie des dames, il poussa un large soupir.

— Elle n’est pas là ! pensa-t-il tout haut.

Il allait se redresser, quand un scrupule lui vint :

— Peut-être que je la vois, ajouta-t-il, sans la reconnaître. Elle doit être bien changée. Quinze ans !

En ce moment, il tressaillit si violemment que Mitraille éloigna son verre à demi-plein de ses lèvres pour demander :

— Que diable avez-vous, mon camarade ?

Estéban ne répondit point.

Juste en face lui, de l’autre côté de la porte, il y avait une femme merveilleusement belle dont la toilette de deuil, simple, mais magnifique, valait une fortune.

Elle souriait en ce moment à un homme jeune encore et très beau cavalier qui portait trop galamment son costume ecclésiastique.

Estéban appuya sa main contre son cœur, comme s’il eût voulu en comprimer la terrible révolte.

— C’est elle ! prononça-t-il entre ses dents serrées, toujours belle ! aussi belle qu’autrefois ! Et souriante ! et heureuse ! sur ce charmant visage, il n’y a nulle trace d’angoisse ! Elle n’a même pas souffert !

Il alla prendre Mitraille par le bras et l’amena jusqu’à la porte.

— Regarde devant toi, dit-il.

— Oh ! oh ! fit Mitraille en mettant à son tour l’œil à la serrure, le cercle de la reine !