Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/153

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la main, j’ignore qui vous êtes et dans quel intérêt vous agissez, mais il est juste que vous soyez récompensé, si je recouvre par vous le titre et la fortune qui m’appartiennent.

— Monsieur le baron, répliqua le More qui était déjà sur le seuil, je viens de loin et j’y retournerai bientôt. Je souffre d’un mal incurable. Vous me reverrez encore une fois et nous réglerons nos comptes.

Il sortit.

Cette nuit-là, les passants et les voleurs purent voir sur le parapet du Pont-Neuf, non loin de la Samaritaine, un homme enveloppé d’un grand manteau blanc, qui était immobile et semblait songer. Les voleurs n’eurent garde de s’approcher de lui, et les passants doublèrent le pas en faisant un large circuit.

Les premières lueurs du jour le trouvèrent au même lieu et dans la même posture. Quand il se leva, enfin, ces paroles tombèrent de ses lèvres :

— Lâche ! lâche et fou ! j’ai vu de mes yeux !

Il descendit le quai à grands pas, et tourna le Louvre pour gagner la rue Saint-Honoré.

Le jour commençait à se faire quand il entra à l’hôtel de Vendôme, demandant le capitaine Mitraille.

Mitraille dormait et rêvait qu’il fendait la tête de ce misérable Estéban d’un magnifique revers d’épée.

Il fut éveillé en sursaut par la voix de don Estéban lui-même, qui était debout sur le seuil et disait :

— Hors du lit et à cheval ! Gagnez à franc étrier