Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/167

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Anne d’Autriche le regardait avec une tendre admiration.

— Vous êtes un Richelieu d’amour ! murmura-t-elle.

Mais il n’y avait personne pour écouter cela, sinon Minette de la gouttière, toute chaude sous l’aisselle de la reine, et le superbe Kaddour, rouant sur les genoux du cardinal.

Quand madame Éliane reprit haleine, à la fin de son récit, la reine tressaillit et prononça tout bas :

— Qu’a-t elle dit, la pauvre femme ?

Certes, elle n’en eût point su répéter le premier mot, malgré cette mémoire du cœur, qui était son seul orgueil.

Heureusement M. le cardinal possédait une de ces merveilleuses organisations qui entendent à tout et ne sont jamais distraites que d’une oreille.

— Madame, répondit-il à Éliane, Sa Majesté est touchée de votre embarras, où il y a certes une faute, mais mitigée par les circonstances. Seulement, Sa Majesté se demande, et moi de même, pourquoi vous avez prolongé outre mesure cette situation dangereuse. Une fois vos droits et ceux de vos enfants établis, ne pouviez-vous déclarer la mort de votre époux ?

— Ah ça ! murmura la reine stupéfaite, Jules, vous aviez donc entendu, vous ?

— La nécessité, répliqua Éliane, m’avait imposé des complices. Ce sont eux qui m’ont empêchée de rentrer dans la vérité. Ce sont eux qui m’oppriment et qui me tuent. C’est contre eux que j’implore le royal secours de Votre Majesté.