Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/210

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majeure chez les bonnes gens de Pardaillan ! En trois mois que j’ai vécu ici je n’ai pas compté tant de lumières. Hardi ! Rodomont !

Sur ma foi, Rodomont prit le petit galop. Ces lumières devaient contribuer à l’émoustiller. Il sentait l’écurie.

Au bout d’une demi-heure, la route tourna et traversa la Peyre sur un pont de forme romaine qu’on laissait tomber en ruines, mais qui semblait solide encore, comme s’il eût été fait d’un seul bloc de pierre. De l’autre côté du pont commençait la solennelle avenue menant au château de Pardaillan.

Notre voyageur, au lieu de prendre cette avenue, choisit un sentier pierreux qui grimpait en zigzag. Au bout de deux ou trois cents pas, il se trouva auprès d’une maison de piètre apparence, vis-à-vis de la haute grille de bois qui fermait les dépendances extérieures du château.

Cette maisonnette était le tournebride de Pardaillan, tenu par maître Minou Chailhou, l’aubergiste le plus oisif de tout l’univers, au dire de notre jeune voyageur. Cette manière de caractériser maître Minou Chailhou pouvait avoir été juste autrefois et redevenir exacte dans l’avenir ; mais, pour le présent, vous auriez peine à trouver parmi les légèretés de la judiciaire humaine une plus criante erreur.

Maître Minou Chailhou, en effet, debout et demi-nu sur le seuil de sa maison ouverte, taillait un quartier de génisse pendu au montant et en distribuait à mesure les lambeaux à Cathou Chailhou, sa fille, qui les portait, sale et toute éche-