Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/257

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Toute son âme était dans ses yeux, reposés avec une sorte d’extase sur son fils et sur sa fille.

Elle portait une robe de velours noir qui faisait ressortir la neigeuse blancheur de ses épaules, sur lesquelles tombaient en désordre les masses opulentes de sa chevelure.

Elle était belle à un point qui ne se peut dire : belle de tout son désespoir et de toute son allégresse.

Estéban la regarda longuement et, tandis qu’il la regardait son souffle s’embarrassait dans sa poitrine.

— J’étais une femme heureuse et bien-aimée ! répéta-t-il en lui-même. Elle a dit cela : que cela soit son salut !

Éliane en cet instant ouvrait la bouche pour parler. Le More se rejeta en arrière.

— Je ne veux rien savoir davantage, ajouta-t-il en s’éloignant. Si elle a péché, c’est affaire à Dieu de la juger. Moi, voici quinze ans, j’ai écrit, j’ai signé vis-à-vis d’elle la promesse de me tuer. J’ai manqué à ma promesse, et, au lieu de lui venir en aide, j’ai aiguisé l’arme qui la devait frapper. Elle a dit cela : « J’étais une femme heureuse et bien-aimée. » Mon devoir est tracé ; après quinze ans, je ferai honneur à mon seing, et ma mort lui sera plus profitable que ma vie !

Il entra d’un pas résolu dans la chambre ouverte, désignée par Mélise, et d’où sortait une pâle lueur.

Mais à peine fut-il sur le seuil qu’il recula, pris d’un serrement de cœur.

Cette chambre était un tombeau. Les murailles