Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/268

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cer une cauteleuse œillade vers la partie de la cloison où le bruit s’était fait entendre.

Si cette œillade avait eu le pouvoir de percer la cloison, un autre regard, ardent et avide, eût croisé celui du conseiller et l’aurait fait muet comme une pierre.

Don Estéban était de nouveau à son poste d’observation.

Saint-Venant dit en rapprochant son siège :

— Nous avons le temps, respectée dame, et il est bon que notre explication soit complète. Je vais rester ici votre ami et votre serviteur ou me retirer votre ennemi. Or, dans ce dernier cas, vous êtes perdue sans ressource. Soyez donc attentive, je vous prie, et raisonnons, comme il convient entre gens sages. Vous avez risqué un jour votre réputation pour sauver la réputation et la vie de la reine ; c’était fort adroit, mais les reines oublient. Par mon patron, madame ! n’y aurait-il point moyen de voir ce qui se passe dans la chambre voisine ? J’ai entendu un souffle : j’en suis sûr !

— Les morts n’ont plus de souffle ! prononça lentement madame Éliane : voyez si ma respiration n’est pas égale et tranquille au moment où elle devrait faire éclater ma poitrine. J’ai déjà le calme des gens qui vont mourir.

Saint-Venant prit la lampe et ouvrit la porte qui donnait sur la chambre du deuil. Il disparut pour un quart de minute et revint précipitamment. Il était tout blême.

— Je n’ai rien vu, grommela-t-il. Je n’aime pas être seul là-dedans. Respectée dame, voici