Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/276

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Vos beaux yeux ne savent point cacher votre pensée. Si vous teniez une fois l’ordre de la reine, je serais un bien petit compagnon. Réfléchissez, ma belle dame : au moment que vous acceptez mes conditions, je deviens plus intéressé que personne au bien de notre maison ; en conséquence, je dois rester dépositaire de l’arme qui est notre sauvegarde commune. Revenez à des pensées plus raisonnables, et stipulez plutôt en faveur de votre fils. Je ne suis point méchant, vous le savez, et, à cet égard, je suis prêt à vous concéder tout ce qui est compatible avec la prudence.

Renaud s’assit à son tour. Il croyait la bataille gagnée, d’autant mieux que madame Éliane avait mis ses deux mains convulsivement crispées sur son visage couvert de pâleur. C’est ainsi que les femmes capitulent d’ordinaire.

— Voyons, respectée dame, reprit Renaud, ce jeune garçon est mon filleul, après tout. Voulez-vous que je lui donne mon nom, au lieu de celui qu’il perd ? Chacun peut avoir commis un péché de jeunesse. Je lui assurerai dix mille livres de pension, je lui achèterai une lieutenance. Par la corbleu ! ce pauvre chevalier Gaëtan voudrait bien coucher dans de pareils draps ! Mais, pour celui-là, son compte est réglé. Voyons, belle dame, décidez-vous, j’ai hâte.

Il attendit un instant la réponse de la comtesse. Comme il allait reprendre la parole, madame Éliane répondit enfin très bas et d’une voix brisée :

— Monsieur de Saint-Venant, je vous prie de vous retirer.