Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/308

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sa poitrine haletante. — Puis elle s’étendit à quatre pieds sur le carreau, cherchant, cherchant, avec avidité, avec folie.

Il se faisait un silence du côté du grand corridor. On eût dit que l’armée judiciaire formait ses rangs.

— Ma mère ! appela notre pauvre Pola. Est-ce que tu ne nous aimes plus ? Ouvre, je t’en prie !

En même temps, une main essaya la serrure.

La comtesse rendit un râle.

À l’autre porte, deux hampes de hallebardes retentirent, frappant ensemble les dalles du corridor.

Et une voix solennelle perça les épais battants, disant : « Ouvrez, de par le roi ! »

Cette voix traversa la chambre du deuil et s’entendit jusque dans le corridor intérieur, car Roger et Pola s’écrièrent à la fois :

— Mère ! oh ! mère ! laissez-nous vous défendre et mourir avec vous !

Éliane avait bondi sur ses pieds, renonçant à chercher le flacon introuvable. Ses yeux brûlaient parmi la pâleur mortelle de son visage. Ses cheveux, violemment hérissés, dénouèrent leurs liens et ruisselèrent sur ses épaules.

Elle s’élança, folle et navrée, cherchant une arme au hasard, et, d’avance, ses mains crispées arrachaient l’étoffe de sa robe, à la place du cœur, pour que le couteau eût un passage facile.

Elle allait, rugissant comme une lionne, et révoltée contre Dieu qui lui refusait le suprême abri du trépas. Elle disait :

— Mes enfants ! mes enfants ! je veux mourir !