Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/307

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— Me voici, Pol, mon mari ! murmura-t-elle comme si, fiancée, elle eût été sur le point d’entrer dans le lit conjugal.

Sa main s’étendit vers la tablette pour y prendre le flacon de cristal. Sa main rencontra le vide ; elle chercha. Les draperies rabattues faisaient le jour bien sombre dans l’alcôve. Ses doigts impatients se prirent à trembler.

Au dehors, les pas avaient fait du chemin. Ils heurtaient déjà les dalles du corridor. Il n’y avait plus de cris, mais on entendait un vague et large murmure.

Éliane était sûre d’avoir mis le flacon sur la tablette. Elle se souvint de ce léger bruit, entendu pendant sa prière. Le flacon avait pu glisser. Elle s’agenouilla et chercha ; une angoisse lui venait au cœur. Elle se hâtait, déjà éperdue, car le temps désormais se comptait pour elle, non plus par heures, non plus par minutes même, mais par secondes.

Il fallait trouver ce flacon à l’instant même – ou vivre !

Or, la vie l’épouvantait comme d’autre peuvent être terrifiés par l’idée de la mort.

Comme elle cherchait, accroupie, des yeux et des mains, tâtant le sol et rendant déjà ces plaintes qu’arrache la détresse, on frappa à la porte du fond de l’alcôve et une voix dit tout bas, une voix qui remua jusqu’à la dernière fibre de son cœur :

— Mère, c’est moi, Roger, votre fils, et c’est Pola, votre fille. Ouvrez !

Madame Éliane appuya ses deux mains contre