Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/73

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Pola restait immobile et comme pétrifiée.

— Fouillez le bosquet ! ordonna-t-on dans le clos.

Et, de l’autre côté du mur, une voix dit :

— Le camarade ne pourra toujours pas s’en retourner par où il est venu : nous sommes là !

Toutes les issues étaient désormais fermées. On entendait les cris chevrotants de la bonne béguine qui gémissait :

— Pola ! malheureuse enfant ! c’est un criminel d’État. Seigneur Jésus ! l’aurait-il enlevée !

Mélise, qui s’était glissée jusqu’à une ouverture de la charmille, revint, la pâleur au front, et dit tout bas :

— Ce ne sont pas les serviteurs du couvent. Vous avez été reconnu, suivi ; il y a là des gens du roi.

— J’aurai le sort de mon père, murmura Gaëtan avec un triste sourire.

Puis, se tournant vers mademoiselle de Pardaillan, il ajouta :

— Éloignez-vous, madame, je dois rester seul ici… et ne me plaignez pas : je ne regrette rien sur la terre.

Deux larmes jaillirent des yeux de Pola qui lui tendit la main en murmurant :

— Vivez ! je vous en prie !

Gaëtan porta la main de la jeune fille à ses lèvres, puis il se redressa transfiguré. Ses yeux étincelaient ; ce fut d’elle-même en quelque sorte que son épée sauta hors du fourreau.

Mélise n’avait point vu, n’avait point entendu cela. Éperdue, elle s’était élancée vers l’hôtel, secouant avec folie la porte condamnée.