Page:Féval - Le chevalier ténèbre, 1925.djvu/118

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Ne nous y trompons pas : on ne tient qu’à cette condition les rênes d’une grande fortune et cette prose est le sol même où fleurissent toutes les poésies de la grandeur.

Mme  la princesse de Montfort comprit le mécanisme des rémérés de plein droit, instrument puissant, qui ne choque pas ouvertement les théories de nos jurisprudences modernes comme le principe d’inaliénabilité ou le droit d’aînesse, mais qui travaille utilement et sans cesse à consolider les grandes dominations territoriales.

— Chrétien Baszin, prince Jacobyi, continua Gaston, ayant été dépossédé à la fin de 1821, avait jusqu’à la fin de 1826 pour racheter son domaine, au prix même de la première vente et sans avoir aucun égard aux ventes successives et partielles qui ont pu intervenir depuis lors. C’est la loi. Tant pis pour ceux qui ont bravé l’éventualité posée par la loi même ! Le prince Jacobyi, profitant du bénéfice de la loi, a racheté son château et son domaine, grand comme une province.

— A racheté ? répéta la princesse. C’est chose faite et bien faite, n’est-ce pas ? Vous m’affirmez cela sous votre serment ?

— Je vous affirme sous mon serment, ma mère, répondit le jeune marquis d’un ton ferme, que le magnat Jacobyi recevra votre demande au château de Chandor où il sera seul et souverain maître. Je vous affirme sous mon serment que si j’amène Lénor dans votre maison, ce sera la princesse Jacobyi, unique héritière de l’immense fortune de son père.

Tout était dit. La princesse garda le silence et Gaston la laissa réfléchir.

Nous profiterons de ce temps d’arrêt pour avouer au lecteur qu’étant donné le caractère de Mme  de Montfort, qui était pourtant une bien excellente et charmante princesse, Gaston avait choisi, avec un tact