Page:Féval - Le chevalier ténèbre, 1925.djvu/31

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qu’elle regarda en riant son fils le marquis ; elle le trouva très pâle et fut sur le point de lui demander s’il prenait au sérieux ces solennelles balivernes. Mais tout le monde est pâle, au clair de lune. Mme  la princesse donna congé au marquis : elle n’avait plus besoin de garde du corps.

— Monsieur le baron, dit le bienveillant et courtois archevêque de Paris, nous ne comptions pas sur cette bonne fortune. Permettez-moi de remercier Mgr  d’Hermopolis pour tout le plaisir que vous nous donnez ce soir.

Le cercle entier fit chorus. C’est dans ce monde, nos lecteurs le savent bien, que les bravos sont charmants et les triomphes mille fois flatteurs.

Mais l’évêque d’Hermopolis n’était pas content. Il avait espéré mieux que cela. On est exigeant envers le virtuose qu’on a produit. Mgr  d’Hermopolis avait laissé échapper plusieurs signes d’impatience, surtout à la fin.

— Il faut avouer, dit-il avec son léger accent méridional, que monsignor d’Altenheimer nous a fait là une malencontreuse révélation ! Où voulez-vous maintenant que soit l’intérêt d’une histoire dont nous savons tous le dénoûment ?

— Votre Excellence connaît-elle en effet le dénoûment de celle-ci ? demanda la voix creuse du baron.

Il suffit d’un mot pour réveiller l’attention. L’évêque répondit en changeant de ton déjà :

— Puisque nous savons que vos deux Bohémiens n’étaient autres que Jean et Ange Ténèbre en personne… la jeune Lénor va être dévorée…

— Pas le moins du monde ! s’écria la princesse, rendue à toute sa vaillance ; j’espère bien que nous allons la sauver… N’est-ce pas, monsieur le baron ?

Le conseiller privé de S. M. le roi de Wurtemberg fit à la ronde un respectueux salut, plus particulièrement adressé au ministre des cultes et à Mme  la princesse.