Page:Féval - Le chevalier ténèbre, 1925.djvu/34

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mes raisons pour croire, je crois ; cela est suffisant. Si j’ai entamé cette digression, c’est que j’en sentais le besoin : tout homme aime à plaider sa propre cause. Je crois à ces choses anormales, c’est que j’ai mes raisons pour y croire et cela suffit ici à tout le monde. Mais il peut se présenter une objection d’un autre ordre, qui me paraîtrait plus grave, parce qu’elle attaquerait ma ligne de conduite même. On ne manquera pas de me dire : si vous croyez, comme vous l’affirmez, comment est-il possible que vous compromettiez ainsi votre caractère dans cette recherche vaine dont vous vous êtes chargé à l’étourdie. Vous acceptez ces deux êtres tels que les a fait la superstition populaire et vous vous mettez à leur poursuite ! Pourquoi ? pour les tuer, eux qui sont immortels ?… Mesdames et messieurs, nous appelons ceci une compétition dans nos universités d’Allemagne. Je crois au contraire qu’ils vivent depuis quatre cents ans et plus…

Ici un murmure où se mêlaient quelques rires poliment étouffés interrompit M. le baron.

— Il est superbe ! dit tout bas l’évêque d’Hermopolis. Il aligne ces folies avec un sang-froid magnifique !

— … Depuis quatre cents ans et plus, répéta M. d’Altenheimer ; c’est mon opinion très ferme et très solidement établie ; mais je ne crois pas qu’ils soient immortels. D’abord, la foi chrétienne ne permet pas de professer qu’il y ait sur notre globe des créatures de chair et d’os qui soient immortelles, ensuite, la tradition orientale est positive sur ce point. Aucun eupire ou vampire ne résiste à la combustion. Comme il me serait peut-être défendu d’expérimenter en France ce système, préconisé par tous les anciens auteurs, je me propose de les emmener à Stuttgard où ils seront brûlés avec soin, après quoi on mêlera leurs cendres avec la terre qui sera divisée en petite portion que l’on transportera au loin dans des directions diverses… S’ils reviennent, après cela, il sera toujours temps de dire que le conseil-