Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 1, 1850.djvu/102

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

m’aurait envoyé des songes à moi aussi… Je suis son frère… Qui donc a le droit ici de l’aimer plus que moi ?

À ces derniers mots, son œil eut encore un éclair farouche, et son regard fit le tour de la chambre comme pour chercher un contradicteur. Il ne rencontra que des visages mornes et dociles, sa colère tomba.

Il s’approcha de sa femme et lui baisa la main d’un air qui demandait pardon ; puis il prit Blanche entre ses bras et la pressa passionnément contre son cœur, tandis que le regard jaloux de Vincent suivait tous ses mouvements.

On eût découvert dans les yeux de Madame un sentiment analogue à celui de Vincent. Elle aussi semblait inquiète, comme si l’enfant n’eût pas été en sûreté dans les bras de son père.

Tout cela eût paru bien bizarre à l’étranger qu’on aurait introduit pour la première fois dans la maison de Penhoël. Il y avait dans la conduite du maître une énigme inexplicable. L’élan de tendresse qui l’entraînait maintenant s’adressait à sa femme autant qu’à sa fille, et contredisait énergiquement ce sombre regard dans lequel il les enveloppait naguère.

Une chose non moins étrange, c’était la froideur égale avec laquelle Madame accueillait les colères, puis le repentir de son mari.