Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 1, 1850.djvu/66

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

d’où, et qui se moquent de la gendarmerie… Il y a tant de trous maudits dans nos landes !

— Ce serait bien le diable, dit l’Américain, si les uhlans nous guettaient justement au passage !

— Il y en a bien d’autres, murmura l’aubergiste, qui ont parlé comme vous, et qui s’en sont repentis !… Mais, j’y songe !… vous arrivez de nuit au bac de Port-Corbeau, et les gens du haut pays disent que l’Oust est débordé…

— Quel danger, une fois qu’on est averti ?…

— Vous venez de la part de l’aîné, répondit le père Géraud, et je m’intéresse à vous comme à un ami… Ne partez pas à cette heure, monsieur, je vous en prie !…, car si le déris (inondation) vous prenait là-bas, sous Penhoël, vous n’auriez plus qu’à recommander votre âme à Dieu !…

L’Américain réfléchit durant quelques instants.

L’Endormeur, que cette longue énumération des dangers de la route affriandait médiocrement, avait bonne envie de venir en aide à la prudence du père Géraud ; mais il n’osait pas, parce que Robert venait de conquérir vis-à-vis de lui une position tout à fait supérieure.

Il sentait que son rôle était de se taire, et il se taisait.