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Page:Féval - Les Belles-de-nuit ou les Anges de la famille, tome 4, 1850.djvu/154

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LES BELLES-DE-NUIT.

Elles se sentaient redevenir vaillantes. La gaieté de Cyprienne gagnait Diane, dont le front se redressait maintenant haut et brave.

Elles mangeaient d’un appétit joyeux, et faisaient maintenant comme chez elles.

Cyprienne servait de tous les plats ! de tous ! Leur faim tenace était de taille à faire table nette.

Leurs verres se vidaient lestement. Ce qu’il y avait de terrible dans leur position disparaissait à leurs yeux. Elles jasaient, elles riaient de bon cœur. Vous eussiez dit deux espiègles enfants, faisant une équipée folle en l’absence de la famille, et n’ayant rien à redouter, sinon le retour de leur mère…

Et certes, le pauvre soldat breton, veillant aux grilles de l’Élysée, aurait eu peine à reconnaître en elles les deux jeunes filles, abattues par la faim et transies de froid, dont la détresse avait ému son brave cœur, au commencement de cette soirée.

Leurs joues étaient colorées vivement ; leurs yeux pétillaient ; leurs voix se mêlaient, libres et gaies.

Elles étaient jolies à ravir !

Diane repoussa enfin son assiette.

— On ne nous empêchera pas d’avoir bien soupé, toujours !… dit Cyprienne ; mon Dieu ! que j’avais grand’faim !