— Hein ? fit madame Cocarde avec curiosité.
Diane regarda sa sœur à la dérobée ; son front devint pourpre ; elle releva les yeux sur madame Cocarde et dit à voix basse :
— Elle souffre… parce qu’il y a deux jours qu’elle n’a mangé.
— Deux jours !… répéta froidement la petite femme ; moi qui ai mal à l’estomac quand j’oublie mon second déjeuner… C’est bien long !
Elle retira sa main pour la replonger dans la poche de sa douillette.
— Deux jours !… répéta-t-elle encore, mais cette fois avec lenteur et comme en faisant un retour sur elle-même ; moi aussi… ces choses-là ne s’oublient pas… moi aussi, j’ai été deux jours sans manger… Bon Dieu ! mes filles, tout le monde a passé par là… C’est le coup d’éperon qui force à faire le premier pas… et je vous promets que les autres pas ne coûtent guère…
Cette froideur subite refoulait l’émotion des deux jeunes filles, et Diane regrettait déjà son aveu.
— Oh ! oh ! continua la petite femme en suivant le cours de ses réflexions ; je savais bien que vous n’étiez pas millionnaires ! mais deux jours sans manger !… Ah çà ! le métier ne va donc pas du tout, du tout ?…
Comme Diane ne répondait point, madame