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Un bruit d’éclats de rire monta du jardin. M. le marquis entr’ouvrit les rideaux d’une croisée et vit un spectacle charmant. Domenica toute brillante de jeunesse et de gaieté jouait avec son fils, le petit comte Roland qui riait dans ses atours enfantins. Ils étaient tous les deux, la mère et son baby, sur une miniature de char valaque avec ses quatre roues égales et sa barre d’avant-train peinte en rouge, où une belle fille aux cheveux noirs, enveloppée dans une mousseline flottante, jouait le rôle du cocher, crânement posée en équilibre. Deux poneys-bijoux traînaient au galop cet équipage sur le sable d’une longue allée.

Et la marquise Domenica, serrant dans ses bras son bambino tout rose criait, plus divertie que le Jésus lui-même :

— Galope, Phatmi ! n’aie pas peur !

M. de Sampierre soupira et regarda le ciel.

— Dieu m’a comblé ! murmura-t-il. Dans l’art comme dans la science, je suis un maître. Fortune sans pareille, noblesse sans rivale, la plus adorable des femmes…

— J’ai lu, dit le joli comte Pernola.

— Et le modèle des amis ! acheva M. de Sampierre d’un ton pénétré.

Pernola reprit de sa douce voix qui eût fait les délices de la chapelle Sixtine :

— Je ne vois rien de mal dans cette lettre.

M. de Sampierre eut un sourire et répondit :

— À votre âge, Battista, vous ne pouvez lutter de pénétration avec moi.