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À vrai dire, il avait une excuse. On le faisait attendre depuis assez longtemps pour que la patience la plus stoïque eût acquis droit de lassitude, mais outre que Mylord était un formaliste décidé, esclave de toutes les convenances, Laure savait parfaitement qu’il avait eu de quoi occuper les loisirs de son attente.

Quoi qu’il en soit, il dormait dans la pose d’Endymion caressé par la lune. Il avait mis son bras sous sa nuque comme le petit fils de Jupiter et sa tête se renversait dans l’abondance de ses cheveux. Chacun sait bien qu’un défaut physique peut disparaître absolument dans certaines attitudes, et Mylord en avait choisi une qui supprimait tout prétexte à son surnom de Torticolis.

Il était en vérité charmant garçon et son cou blanc, incliné avec grâce dans le sens de sa déviation, provoquait le regard.

Non pas à demi, je tiens à mentionner cette circonstance ; Mylord avait ôté sa cravate et lâché le bouton de sa chemise.

Il faisait très-chaud ; madame la baronne de Vaudré ne chercha d’abord aucune autre raison, pour expliquer le sans-gêne de Mylord ; mais en approchant, elle fut frappée du soin qu’il avait mis à composer son attitude. Tout tableau a sa pensée. Si un photographe eût saisi le sommeil de Mylord, on aurait pu écrire au bas de l’estampe : « Un jeune monsieur qui veut montrer son cou. »

Laure connaissait déjà son Mylord sur le bout du doigt. Elle obéit à l’injonction de l’écriteau et regarda.

C’était pour elle le jour aux surprises. Le hasard lui