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Page:Féval - Les Cinq - 1875, volume 2.djvu/21

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agitations de notre siècle. Chaque créature humaine, dit-il, a sa vocation et chaque vocation a sa créature : cela ressort de la toute-sagesse de Dieu. Il ne s’agirait donc que de trier parmi les grandes dames celles qui ont des instincts de cuisinières et parmi les cochers ceux qui se résigneraient à être ducs. C’est une affaire de soins. Et une fois que tout Belleville serait inscrit à la Salle des croisades, le monde irait, soyez certains de cela.

M. Chanut était né policier, comme le grand Condé, général d’armée. Il avait eu son Rocroy aux environs de ses dix-huit ans, ainsi que nous avons déjà pu le dire et, déjà revêtu de la dignité d’agent auxiliaire (no 17), il s’était promené dans les dessous de notre histoire dès le temps où elle déroulait ses premières scènes à l’hôtel Paléologue.

Depuis lors, à l’exemple de tous ceux de son métier, il avait été mêlé à une innombrable quantité d’aventures publiques et privées où son sang-froid professionnel coudoyait toutes sortes de passions, où son paisible caractère passait à travers les drames les plus violents, où son honnêteté, j’allais dire sa candeur vivait de pair à compagnon avec le crime.

La salamandre est au frais dans le feu. M. Chanut savait, assurément, le monde sur le bout du doigt, et, mieux que n’importe quel romancier ; mais c’était une science d’État, et qui ne tirait les conséquences, ni en long, ni en large. Il était limier par instinct, en dehors de toute philosophie. Il ne croyait pas aux calculs déductionnistes des charlatans américains et anglais qui essayent d’idéaliser la détection, et de remplacer le