Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/103

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sur un banc de granit, ombragé par d’épais feuillages.

Vincent ne pouvait les voir encore à cause du détour de l’allée.

La mère Marie-de-Grâce, comme on l’appelait, semblait avoir atteint le milieu de la vie. Ses traits étaient remarquables par leur régularité noble mais froide. Son front et ses joues avaient une pâleur mate et uniforme. On trouve beaucoup d’Italiennes qui ont ce genre de beauté sculpturale, dont le défaut est presque toujours la dimension un peu exagérée des traits. Ses cheveux étaient courts, mais abondants et noirs comme le jais.

Irène avait seize ans. Sa protectrice, la comtesse Francesca Corona, lui disait en riant qu’elle était laide. Et, par le fait, Irène avait été bien plus jolie à dix ans ; l’âge de la transformation pesait sur elle. Ce n’était plus une enfant, ce n’était pas une femme.

Mais c’était, malgré tout, un être charmant. Si elle tardait un peu à se former, les délicieuses promesses de l’avenir souriaient du moins et laissaient deviner leur secret.

Francesca disait aussi :

— Dans deux ans, elle éblouira !

Irène portait l’uniforme du couvent : quelque chose d’étroit, de long, de mal taillé, qui semble calculé pour souligner la disgrâce des années douteuses.