Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/111

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— Voilà le vrai fou ! Celui-là t’aime trop ; moi, qui n’ai jamais eu qu’un seul amour en toute ma vie, je ne sais pas si j’aimais mon Irène, ta mère, comme je le vois t’adorer.

— Moi aussi, je l’aime bien, dit la jeune fille avec une sorte de recueillement.

Ses paupières étaient baissées. Un voile de pâleur avait remplacé le vermillon léger qui naguère veloutait son visage.

— Seras-tu assez belle ! pensa tout haut Carpentier. Tu es tout le portrait de ta mère.

Il l’attira sur son cœur en un brusque élan de tendresse et ajouta :

— Alors, elle te donne des leçons d’italien, cette puissante Marie-de-Grâce ?

— J’ai eu le bonheur de lui plaire, répondit Irène, et il ne faut pas railler quand on parle d’elle.

Carpentier effaça du pied le dessin de kiosque qu’il venait de tracer, et dit avec une distraction soudaine :

— C’est une ressemblance comme on en voit tant, après tout…

— Quelle ressemblance ? demanda Irène vivement.

— Bon ! fit Carpentier, voilà que je cause tout seul ! C’est Reynier qui a esquissé un scélérat de tableau… Tu verras que ce polisson-là fera un grand peintre !