Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/135

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Francesca était toujours charmante, mais un fardeau de tristesse pesait sur elle. Maintenant elle savait se taire.

Quant à Vincent Carpentier, Reynier ne sut pas définir tout de suite le changement qui s’était opéré en lui. C’était bien toujours le même cœur, mais l’intelligence subissait une crise singulière. Par instants, Vincent était tout ardeur ; la carrière de Reynier, son avenir, telle était désormais son idée fixe, et il expliquait cela d’un seul mot, disant : « Reynier et ma fille ne font qu’un ; à eux deux, ils sont tout mon espoir. »

C’était vrai, mais sans cause apparente, cette ardeur tombait. D’autres préoccupations dont nul n’avait le secret s’emparaient de sa pensée. Il était froid, distrait, presque indifférent.

Reynier se consolait en songeant à Irène, dont les lettres régulières et ponctuelles l’avaient soutenu pendant son séjour à Rome, à Irène qui l’avait embrassé de si bon cœur au retour.

Ah ! certes, celle-là n’avait pas changé, ou plutôt, en subissant l’adorable transformation qui faisait d’elle, la poupée d’hier, une jeune fille merveilleusement belle, presque une femme, elle avait gardé toute la chère sérénité des enfants.

Aucun trouble ne s’était mêlé au plaisir si franc qu’elle avait éprouvé en jetant comme autrefois ses deux bras autour du cou de Reynier.