Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/187

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et gagne à coups de cornes la royauté de la prairie. Ainsi en était-il dans les sérails d’Orient. Égorger ou mourir, c’est la loi naturelle des barbaries.

Celui qui écrit ces pages a écouté un soir, assis sur un fragment de marbre rose, dans les ruines du temple de Pœstum, les récits d’un guide sorrentin, tout fier d’avoir été Habit-Noir (vesta nera) sous Bel-Demonio, le Maître des Compagnons du Silence.

Mon guide savait encore les trois mots latins, devise de la mystérieuse confrérie : Agere, non loqui.

FAIRE ET SE TAIRE. Superbe enseigne qui ne sera jamais celle de nos assemblées.

Bel-Demonio, tout jeune et si beau qu’il ressemblait à un Dieu, périt d’une mort horrible et splendide, enseveli sous les laves du Vésuve. Et le piège où il tomba avait été dressé par le chef suprême des tiers-carbonari, Michel Pozza ou Pozzo — Fra-Diavolo — son père.

Le guide ajoutait :

— Tant que la montagne sera au-dessus de la plaine, il y aura des bandits chez nous ; mais le bon temps est passé. Les Grands-Larrons sont partis vers l’ouest et le nord, ils ont emporté ce qui était dans la « Maison des Richesses, » les perles, les diamants, tout l’immense trésor des joyeux moines de la Merci. Ils n’ont laissé chez nous que les chiens, les pauvres et les baïoques.