Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome I.djvu/216

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l’air qui passe par le trou des serrures, par les fentes des fenêtres. Le pain que je mange me fait peur.

En regagnant la table, il repoussa du pied les pans de la houppelande qui traînait jusque sur le tapis.

— Fou ! misérable fou ! murmura-t-il. Un déguisement ! Tromper les yeux, d’un pareil trésor ! car l’or a des yeux, l’or se garde et se défend, l’or voit tout, l’or est Dieu !

Le grand chien s’étira en hurlant tout bas et vint se frotter contre lui.

— À bas, César ! fit Vincent.

Il se laissa retomber sur son siège et appuya son front contre sa main. Son front brûla sa main.

— Je suis perdu ! reprit-il. Que Dieu soit remercié pour l’idée que j’ai eu d’éloigner les enfants ! Quand la maison sautera, les débris ne les atteindront pas… à moins que cette femme n’accuse aussi Reynier. Il y a le tableau. C’est une barbarie du hasard. Je ne mourrai pas tranquille de ce côté… et de l’autre ? Ma fille ! cette pâle figure de religieuse italienne, que je connais si bien ! ce visage qui est celui du tableau et qui est celui de l’homme mystérieux… mon concurrent… de l’homme qui rôde comme moi autour du trésor… Ma fille ne sait rien. Oh ! je le jure ! J’aurais arraché ma langue avant de confier à ma fille ce fatal secret. Croyez-moi, je dis la vérité vraie, ce sera un crime inutile. Épargnez Irène ! épargnez ma chère enfant !…