Page:Féval - Les Compagnons du trésor, 1872, Tome II.djvu/24

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sonné en grand depuis ce temps-là, et que d’avoir traversé les pays chauds des tropiques de l’équateur, ça m’a bronzé le teint en perfectionnant le coup de soleil que j’avais déjà en foire. Voilà mon raisonnement : c’est certain que si les Habits-Noirs me cherchaient, la précaution de nous avoir changés tous deux en M. et Mme Canada serait inférieure, mais ils m’ont oubliée ; les trois quarts de ceux que j’ai fréquentés momentanément, en faveur de Maurice et Valentine, ont avalé leur langue, y compris Toulonnais-l’Amitié et ce vieux cafard de colonel. Ceux qui restent ont d’autres chats à fouetter ; et comme il n’y a pas grand chose à faire avec moi, ils me laisseront tranquille, si je ne vais pas les tirer par le pan de leur veste en criant : « Regardez-moi, me voilà. »

Ça se peut bien tout de même, dit Échalot, qui fit effort pour paraître convaincu. J’accepte l’état civil de Canada. Va-t-on dîner à la barrière ?

— Minute ! répliqua la bonne femme dont l’accent devint plus grave, tandis qu’elle prenait dans son fauteuil une pose tout à fait majestueuse. C’est pas fini. J’ai condescendu avec obligeance à te fournir des explications que j’aurais pu m’en dispenser en te disant : tu m’agaces ! À mon tour, j’en exige, et de plus importantes. Aie la bonté de me regarder dans le blanc de l’œil.

Échalot obéit, mais ses paupières battaient.