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Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome I.djvu/232

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— Chère follette ! balbutia le vieillard, » ému par cette caresse.

Fanchette n’en abusait pas, et, pour un baiser d’elle, le colonel aurait fait des extravagances.

Elle se redressa, grandie et cambrant la gracieuse hardiesse de sa petite taille.

« Je veux essayer ! » déclara-t-elle.

Lecoq et le colonel firent le même mouvement pour la retenir, mais elle glissa entre leurs mains comme une anguille. Quand ils purent la rejoindre auprès du lit, sa fantaisie était satisfaite. Par deux fois et avec une incroyable violence, sa petite main crispée convulsivement avait frappé le mort au visage.

Le colonel arriva juste à temps pour la recevoir entre ses bras où elle tomba, demi-pâmée.

Sur la joue livide d’André Maynotte, deux marques bleuâtres ressortaient, dessinant deux fois les cinq petits doigts de Fanchette.

Elle fixa ses grands yeux désolés sur ces marques. Tout son sang lui monta d’un coup au visage pour céder bientôt la place à une pâleur plus mate. Ses larmes jaillirent abondamment, et un spasme, fait de sanglots, souleva sa poitrine.

« Je l’ai blessé ! Tu vois bien ! cria-t-elle d’une voix entrecoupée, tu vois bien que je l’ai blessé ! »

Ses deux compagnons restaient muets d’étonnement. M. Lecoq serra le bras du colonel. Une imperceptible contraction venait de crisper les lèvres d’André Maynotte.

Il fallait brusquer le dénouaient. M. Lecoq enleva Fanchette dans ses bras et s’élança vers la porte. D’instinct, Fanchette eût résisté, mais l’émotion la brisait. M. Lecoq disait :

« Tu as beau me détester, fillette, je ne veux pas que tu te rendes malade ! »