Page:Féval - Les Habits noirs, 1863, Tome II.djvu/193

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— As-tu tué, toi, Mathieu ? » demanda Lecoq avec brusquerie, mais sans rien perdre de sa gaieté.

Évidemment, il profitait d’un moment d’expansion pour obtenir de son compagnon une réponse parlée ou muette.

Mais Trois-Pattes garda sa gaieté froide en répondant :

« Et vous, patron ? »

Et comme M. Lecoq fronçait ses sourcils blancs, il ajouta :

« M. Schwartz est au salon, vous savez, et la baronne dans le boudoir.

— À deux pas l’un de l’autre ! murmura M. Lecoq, subitement déridé au cours d’une pensée nouvelle. La porte entre deux, elle ne ferme qu’au loquet. De quoi serait capable cet Othello alsacien ?

— La baronne sait qu’il est là, répondit Trois-Pattes. Elle a sur la figure un voile épais comme un masque. »

M. Lecoq appuyait le bout de son doigt contre son front.

« Il y a des mondes là-dedans ! dit-il avec un orgueil profondément convaincu. Nous irons loin, monsieur Mathieu, et vous retrouverez une paire de jambes, si cela peut s’acheter avec des billets de banque. À propos de billets de banque, les nôtres sont-ils retouchés ? »

Trois-Pattes déboutonna sa veste de velours et prit un portefeuille dans sa poche.

Pendant qu’il l’ouvrait, M. Lecoq poursuivit :

« Il est bon que ce Schwartz et sa femme attendent. Il faut qu’ils sachent de quel bois je me chauffe. On va voir tout à l’heure quelque chose de curieux. J’ai tout dans ma tête, tout ! »