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À Londres, l’Habit-Noir ou le Black-Coat et ses mirmidons occupèrent les badauds toute une saison. Les méfaits attribués à la bande furent nombreux et du meilleur choix. Seulement, les gens raisonnables, ayant quelque teinture du droit, n’hésitèrent pas à nier l’existence du mystérieux chef de voleurs : chaque crime, en effet, ici comme à Paris, se soldait devant la justice par une condamnation.

À quoi bon chercher au delà ? L’Habit-Noir était une superfétation et, l’eût-on arrêté par hasard, la loi n’avait rien à réclamer de lui !

Ainsi parlaient les sages, mais la sagesse a-t-elle le sens commun ? Les fous croyaient dur comme fer à l’Habit-Noir : un vampire double, un monstre qui assassinait deux fois, par le poignard d’abord, ensuite par l’échafaud…

Et le colonel perdait son argent galamment, selon son habitude.

Les gens qui ont quelque chose à cacher changent de nom. Le colonel n’avait garde : c’était le colonel Bozzo à Paris, à Londres, partout. Il y eut bien au club des rumeurs sortant on ne sait d’où ; les méchantes langues se demandèrent bien les unes aux autres ceci, cela, mais le gentleman français avait été présenté selon les formes, et il était beau joueur.

Son partner habituel était John Mason, un fils de nabab, dont le père avait gagné des millions à empoisonner les Chinois. Ce Mason passait pour avoir cent cinquante mille livres de revenus (deux millions sept cent cinquante mille francs). Il venait de se marier avec une comédienne et s’en repentait, selon l’usage.

Un matin, il partit en compagnie du colonel sur un navire qui faisait voile pour l’Italie. Voici le bruit qui courut dans Londres à ce sujet : John Mason, hypo-