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JOUVENTE DE LA TOUR.
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vie les derniers pas de son vieux père. Elle était belle ; de longs cheveux blonds encadraient son visage, plus suave que celui d’une sainte ; l’angélique pureté de son âme rayonnait dans la prunelle bleue de son grand œil, et, lorsqu’elle courait gaiement dans les bruyères, on pensait involontairement à ces gentilles fées que voyaient, dans leurs hautes extases, les bardes inspirés de l’antique Bretagne.

C’était au manoir de Rostan du Bosc, dans la chambrette de Nielle, que brillait cette lueur lointaine qui faisait dériver chaque soir le bateau de Jouvente. Jouvente aimait Nielle. Quant à celle-ci, le manuscrit latin dit qu’elle n’aimait point autre chose que son vieux père, l’ombre des chênes, la fleur d’or des genêts et la douce voix du rossignol qui chantait, les nuits d’été, devant sa fenêtre ouverte. Mais Nielle n’avait que quinze ans : l’amour prend son temps avec les jeunes filles de cet âge ; il sait que l’heure vient où tombe tout à coup cette enfantine indifférence, et il attend, en dieu d’esprit, sûr de son fait.