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Page:Féval - Maman Léo, 1869.djvu/117

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— Ceux qui ont tué Remy d’Arx : les Habits-Noirs !

La veuve tressaillit de la tête aux pieds ; mais Valentine lui jeta ses bras autour du cou en riant bruyamment.

Et comme la pauvre maman Léo restait toute bouleversée, la jeune fille ajouta dans un baiser :

— Vous oubliez votre rôle, parlez-moi donc de l’évasion ; ils vous guettent !

La dompteuse n’aurait pas été plus complètement étourdie si on lui eût rendu sur le crâne le coup de boulet ramé qui avait fait la fin de Jean-Paul Samayoux, son mari.

Elle essaya d’obéir pourtant et dit comme au hasard, répétant à son insu les propres paroles de M. Constant :

— Il n’y a pas de serrure dont on n’achète la clef avec de l’argent ; tout le monde est riche ici et tout le monde a bonne volonté de mettre la main à la poche. On m’a dit comme ça qu’il n’y avait que toi, fillette, pour s’opposer à la délivrance de Maurice.

Valentine se renversa en arrière et prit une attitude de profonde réflexion.

— Penses-tu qu’on puisse condamner un innocent ? murmura-t-elle ; et tu sais bien qu’il est innocent, n’est-ce pas ?

— Si je le sais ! répliqua Mme Samayoux : quand il y aurait cent millions de juges pour dire le contraire, je crierais encore qu’il est innocent ! Mais ça n’empêcherait pas un malheur, vois-tu, fillette ? parce que les juges sont les maîtres. Et on en a tant vu qui étaient blancs comme neige, porter leur pauvre tête sur l’échafaud ! Voyons, il faut te faire une raison : quand Maurice